La restauration du ruisseau Dead Run donne une nouvelle vie à la voie navigable de Chesapeake

La protection des bassins versants de la baie de Chesapeake et de son vaste écosystème est une priorité absolue pour les autorités gouvernementales et les groupes de défense des bassins versants. Des efforts considérables sont donc déployés pour restaurer plusieurs affluents qui se jettent dans la baie.

La restauration du Dead Run, l’un des ruisseaux du bassin versant qui appartient au réseau hydrographique de Catonsville (Maryland), a été désignée par le département chargé de la protection de l’environnement et du développement durable du comté de Baltimore (DEPS) comme un projet prioritaire. Cette désignation tient aux faits que les berges du cours d’eau subissent une forte érosion, que le ruisseau interagit peu avec les plaines inondables, qu’il est constamment obstrué par des chutes d’arbres, que des conduites d’égout se retrouvent exposées et que l’exutoire pluvial est endommagé.

Si l’on n’intervenait pas, le Dead Run continuerait de se détériorer et de grandes quantités de petits sédiments, d’azote et de phosphore provenant de l’érosion s’écouleraient dans la baie de Chesapeake. Ces trois contaminants sont connus pour affecter la qualité biologique de l’eau de la baie, car ils causent de la turbidité et entrainent la prolifération d’algues qui nuisent à la croissance de la végétation sous-marine et aux espèces biologiques qui dépendent de cette végétation pour se nourrir et s’abriter.

Afin d’inverser la tendance et de faire cesser la détérioration du Dead Run, le DEPS a demandé à WSP États-Unis de lui fournir des services de conception environnementale pour réhabiliter le ruisseau. L’entreprise était chargée d’évaluer le niveau de dégradation du ruisseau, de définir les limites du projet pour la construction, de concevoir des concepts de traitement et des solutions de rechange à privilégier et d’offrir des services-conseils pendant la construction.

« La réduction des polluants et le développement d’un ruisseau sain et durable étaient les principaux objectifs de ce programme de restauration de l’environnement », déclare Justin Lennon, directeur de projet et responsable de la pratique nationale du contrôle des structures hydrauliques et des inondations pour WSP. « Notre conception pour Dead Run repose sur une approche hybride qui combine des méthodes de conception de canaux naturels et des processus de gestion des flux afin de traiter l’eau de façon appropriée. »

Le projet visait à stabiliser le ruisseau afin de réduire l’érosion des berges et la pollution de l’eau qui en découle, à concevoir un cours d’eau durable, à encourager le développement de l’habitat aquatique, à reconnecter les nappes souterraines aux zones racinaires riveraines pour favoriser l’établissement de zones tampons plus saines et de l’habitat aquatique et à reconnecter les plaines inondables pour qu’en cas de débits élevés, l’eau puisse se répandre à l’extérieur du chenal.

Les travaux ont commencé en 2012 quand WSP a réalisé une étude sur le bassin versant des hautes terres ainsi qu’une étude géomorphologique complète du réseau hydrographique. L’équipe de WSP a surtout découvert que les écoulements incontrôlés dus aux averses soudaines dans le bassin versant urbanisé se concentraient dans le chenal, ce qui causait d’importantes dégradations du ruisseau.

Des matériaux naturels ont été utilisés pour reconstruire le ruisseau Dead Run sous tous ses aspects. Le lit du ruisseau a été construit à l’aide de roches de carrière de la région et de graviers récupérés dans le chenal.

Les berges ont été conçues en récupérant du tréfonds et en y ajoutant une couche arable et une sous-couche en fibre de coco biodégradable pour assurer la stabilisation à court terme des sols.

Bien qu’il soit généralement contreproductif d’enlever des arbres pour atteindre les objectifs à long terme d’un projet de restauration de l’environnement, dans ce cas, il était nécessaire d’enlever certains arbres pour niveler le cours d’eau et répondre aux exigences de construction. Par ailleurs, cela a permis à Justin Lennon et à son équipe de trouver un moyen d’améliorer l’intégrité environnementale du projet.

« Le bois enlevé pendant la construction a été réintégré à la rivière afin de réduire les déchets, de fournir des matériaux durables et d’améliorer l’habitat, explique Justin Lennon. Ces structures en bois sont naturellement durables; elles protègent davantage les principales rives des cours d’eau et constituent un habitat pour les poissons et les macroinvertébrés. »

Dans l’ensemble, la conception repose sur la bioingénierie afin d’en assurer la durabilité à long terme. Les aspects de bioingénierie de la conception comprennent l’implantation d’herbes riveraines indigènes sur les berges du ruisseau et sur les berges riveraines récemment nivelées, l’ajout de piquets de saule et de cornouiller sur les berges des cours d’eau afin de favoriser l’enracinement des plantes ligneuses idéales pour stabiliser les sols ainsi que la plantation d’arbres et d’arbustes.

« D’ici cinq ans, compte tenu de la forte croissance de la végétation et de l’intégration des matériaux naturels, il sera difficile de voir que ces portions du Dead Run ont été conçues par l’homme », déclare Justin Lennon.

La conception comprend un innovant bassin de rétention non relié au réseau qui capte les eaux de ruissellement de faible débit à partir d’un exutoire situé au bout d’un petit affluent. L’équipe a mis au point un nouveau système de répartition des flux au niveau de l’exutoire pour siphonner des eaux pluviales de faible à moyen débit afin de les traiter, tout en maintenant les débits de base et les débits élevés du cours d’eau.

« Cet important élément de conception était délicat à mettre en place, car nous devions répartir les flux de manière à ce que le cours d’eau conserve son débit de base pour maintenir l’écosystème aquatique, explique Justin Lennon. De plus petits flux d’eaux de ruissellement ont été dirigés vers l’installation de traitement des eaux, car ils étaient très utiles pour améliorer la qualité de l’eau une fois qu’ils avaient été traités. L’eau des fortes pluies a été acheminée directement au cours d’eau, car l’installation de traitement des eaux ne permettait pas de les gérer. »

La résilience du projet de restauration du cours d’eau a été mise à l’épreuve avant son achèvement en 2018 quand une tempête extrême a frappé la zone du projet et la ville voisine d’Ellicott pendant le week-end du Jour du Souvenir. Lors de cette tempête, il est tombé plus de 250 mm de pluie sur la région en quatre heures, ce qui a causé des inondations et des dommages considérables.

Une fois que la tempête s’est calmée, Justin Lennon, qui vit à Catonsville, à cinq kilomètres du projet Dead Run, se demandait dans quelle mesure la rivière allait résister au déluge.

« La tempête était si intense que certains endroits qui n’avaient encore jamais été inondés ont été submergés dans notre ville, précise Justin Lennon. Après la catastrophe, j’ai immédiatement pensé que le projet Dead Run aurait pu être anéanti. J’étais très soulagé le lendemain quand j’ai vu qu’il avait survécu à la tempête. »

Certes, il y a eu des dommages. Près d’un tiers des plants d’arbres ont été emportés par l’inondation, et certaines roches ont été déplacées jusqu’aux exutoires. Néanmoins, au final, étant donné qu’il s’agissait de la tempête la plus violente jamais enregistrée au cours du dernier siècle, les dommages s’avéraient mineurs et tout fut entièrement réparé et terminé d’ici novembre 2018.

« Au lieu de détruire le projet, la tempête a validé la résilience de la conception et de la construction que nous avions mises en place », explique Justin Lennon.

Aujourd’hui, la réhabilitation du ruisseau et les pratiques de gestion exemplaires mises en œuvre ont porté leurs fruits. Le cours d’eau a atteint tous les objectifs du projet, tandis que les arbustes, les herbes et les arbres qui ont été plantés croient densément dans les nouvelles plaines inondables.

Des habitats de terres humides prennent forme dans les plaines inondables, améliorant la qualité de l’eau pour les années à venir. Le foisonnement biologique est tout à fait notable, alors que d’importantes communautés d’écrevisses et de naseux noirs recolonisent le ruisseau.

Au final, il n’y a pas une méthode précise à privilégier pour concevoir des projets de restauration de cours d’eau, car chaque rivière nécessite une approche individuelle en fonction des différents facteurs environnementaux et de l’amélioration des techniques.

« Les conceptions en matière de restauration de cours d’eau sont en constante évolution et chaque projet que nous réalisons comporte des variantes et des améliorations basées sur ce que nous avons appris des projets antérieurs, explique Justin Lennon. La conception du Dead Run n’y échappe pas. »

Compte tenu de l’excellente performance du Dead Run lors de l’inondation du Jour du Souvenir en 2018, ce type de conception a été utilisé par la suite pour des projets de réhabilitation de cours d’eau similaires ailleurs aux États-Unis.

« Ce projet signifie beaucoup pour moi, car il valide les approches Conçu pour l’avenir^MD que nous avons développées chez WSP pour la conception de restauration de cours d’eau », conclut Justin Lennon.